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Le pervers narcissique, un manipulateur amoureux
Comment ne plus succomber aux sirènes séductrices et tentaculaires du pervers narcissique
La perversion narcissique est un concept à la mode. On le conjugue sans discontinuer jusqu’à l'overdose !
Qui ne connaît autour de soi une victime de ce tueur retors qui ne trouve le repos qu'en l’assujettissant ? Et pourtant, il a tant de charme ce séducteur machiavélique qui sait, avec art, mystifier sa victime. Véritable stratège, il la ferre avec une maestria consommée, et en fait le siège avec persévérance et éloquence. Rien n’est trop beau pour se l’approprier. Avec discrimination, il sait choisir la proie qu’il va immoler, et maîtrise parfaitement les travaux d’approche. Nous utiliserons plus généralement le genre masculin ici pour désigner ce tacticien de la séduction, même si la perversion narcissique se conjugue également au féminin.
Le cas clinique que je relate plus bas, illustre, dans ses différents modes et moments, la dynamique mortifère à l’œuvre dans ce type de relation d’emprise, et comment après un temps parfois très long de sape, on s’en extrait enfin… mais… terrassé(e) !
Il va sans dire qu’un travail psychothérapeutique de reconstruction permettra de comprendre comment on a pu se laisser piéger, et comment éviter de retomber dans les griffes de ce prédateur, ou d’un autre…
Le pervers narcissique ou PN n’abandonne pas facilement. Vous le mettez à la porte, il revient par la fenêtre !
Il se joue une histoire dont chaque rebondissement laisse la victime exsangue.
Les rouages et repères demeurent invariables dans cette pathologie. Le tueur à l’image interne souvent défectueuse, au "vide vertigineux dans lequel tout affect semble avoir été éteint depuis l'enfance" choisit une victime intelligente, subtile, généreuse qui, pour combler cette béance intérieure, lui donnera un sein nourricier et salvateur dont il se nourrira. Nous sommes dans une dyade bourreau victime qui s’alimente dans une dépendance difficile à rompre. Attirance, ensorcellement, fascination, aliénation sont les maîtres mots qui caractérisent cette prise de possession. La victime, abusée, dominée, manipulée est comme lobotomisée, soustraite à elle-même et à sa propre route. Cette séduction mortifère se déploie comme une toile d’araignée en un réseau de signes insidieux ayant pour vocation une captation de l’autre qui se fait de plus en plus prégnante. Telle une lente mise à mort, la rencontre a pourtant débuté sous de magnifiques auspices. Le romantisme initialement au rendez-vous, l’échange vibrant et palpitant, l’attirance irrésistible, sont autant de leurres utiles au prédateur pour hameçonner sa victime et l’envelopper d’une bulle de mots sans fin, et promesses qui ne verront jamais le jour.
Le manipulateur a une dextérité magistrale pour vous enrober, vous parler de mille et un sujets auxquels à la fin vous ne comprenez plus rien. Il noie le poisson dans une sorte de diarrhée verbale qui confine à l’art oratoire. Sans parler des mille projets mirifiques qui demeureront sans suite !!!
Cet être sagace, malade, qui refuse de se soigner, ne peut réellement se projeter dans un projet à deux ; trop égocentré, l’altérité lui est étrangère. Il ne peut que projeter sur l’autre sa propre pathologie, dans une remise en question constante de la santé psychique de l’objet manipulé, faisant passer pour malade la victime qu’il berne. Même les « psys » les plus aguerris peuvent se laisser leurrer, car le « PN offre à l’observateur l’air de la parfaite innocence » observe Marie-France Hirigoyen en 1998 dans son livre « Le harcèlement moral ».
Ce prédateur aguerri sait feindre une sensibilité, par ailleurs inexistante, pour venir anéantir l’intégrité psychique de sa victime dont il envie la vie intérieure qu’il n’a pas. « Il se fait valoir aux dépens d’un autre » écrit Paul Claude Racamier, le créateur du concept de pervers narcissique .
Clara, ma patiente, dont je narre l’histoire plus bas, me disait innocemment : « James me dit souvent qu’il aime se nourrir de moi et ne peut se passer de moi, alors toujours j’espère qu’un changement est possible ! ». Il va sans dire que ces paroles vampirisantes rassuraient Clara dans l’instant pour la laisser ensuite dans un état de sidération, d’hébétude et d’hésitation. Fallait-il le quitter ou ne pas le quitter ? James ne pouvait être aussi mauvais dans son besoin qu’il avait d’elle. Il allait même jusqu’à se faire passer pour la victime avec une sincérité convaincante d’enfant blessé : « Clara, tu es méchante ! » lorsqu’elle osait s’opposer à lui, avec beaucoup de diplomatie néanmoins !
Ne nous y trompons pas, seule sa blessure d’orgueil fait souffrir le PN ! Et lorsque la victime se trouve dans ses rets, elle en arrive à douter de sa propre intégrité mentale, tant le discours du prédateur peut sembler logique !
Cet insatisfait chronique, égocentrique qui jalouse la santé psychique de l’autre articule tout autour de ses propres besoins. Il a toujours raison, et ne demande jamais pardon sauf si cette requête sert sa stratégie délétère. Son système relationnel repose sur le déni et le clivage de la réalité, une réalité en partie occultée : « Ce n’est pas moi, c’est l’autre ». Toute tentative de discussion est obérée, on ressort d’une discussion avec lui le cerveau totalement embrumé, dans un état stuporeux, en n’ayant prise sur rien, avec l’impression cuisante d’être une « merde, une personne sans qualité ». Aucune communication n’est claire, les évidences sont niées. En proie à une tension interne permanente, ambigu dans ses propos et ses affects, colérique, il lui arrive de quitter la table, claquer la porte, insultant et menaçant, laissant l’autre dans une déroute assurée… pour revenir une heure plus tard comme si rien ne s’était passé !
Invalide des affects, il sait se retirer des jours et des nuits dans un repli autistique devant ses écrans, dans son bureau, faisant fi des besoins légitimes de l’autre dont il se gausse, et qu’il annule en tant que partenaire de vie. Réduite à l’état d’objet, la victime peu à peu se délite au contact de cet être masqué qui finalement ne révèle rien d’autre sur lui-même que des banalités. Il ne s’évoque jamais dans son intimité psychique, mais vous noie dans des discours théoriques et conceptuels interminables dans lesquels lui-même à la fin se perd.
"Rien n'est plus 'blessable' qu'un narcissisme non pathologique attaqué par un narcissisme pervers… Le mouvement pervers narcissique est une façon organisée de se défendre de toutes douleurs et contradictions internes et de les expulser pour les faire couver ailleurs, tout en se survalorisant, tout cela aux dépens d'autrui et non seulement sans peine, mais avec jouissance" écrit à nouveau Paul-Claude Racamier dans " Le génie des origines ".
Le PN expulse sur l’autre sa propre confusion mentale, lui perfusant la dépression ou la psychose qu’il cherche à esquiver, dans une obsession constante de paraître et de savoir.
Alors, pour la victime assoiffée d’amour, se succèdent l’attente, les déconvenues, les douches écossaises alliant promesses et dénis, les allers-retours, les sautes d’humeur cinglantes, les bouderies et mutismes, les monologues incohérents, les alternances de tendresse et de maltraitance. Tout s’effrite, s’anéantit, le rêve s’évanouit pour soudain repartir de plus belle lorsque le pervers sentant sa proie exténuée lui échapper et ne pouvant plus l’utiliser, rejoue la même partition dans une tentative de récupération. Il regagne alors sa sympathie, son amour, et recalcule sa stratégie dans un manque total d’empathie. Comme le disent joliment les Anglo-saxons « You need two to tango » (il faut être deux pour danser le tango) jusqu’au moment où, touchant le fond, et craignant pour sa vie, la victime se réveille enfin de ce long sommeil empoisonné. Le temps de guérir est venu, couronné comme l’exprime Sandor Ferenczi par celui de la renaissance :
"La partie non détruite du moi s’empresse de construire, à partir des fragments préservés, une nouvelle personnalité (mais qui porte sur soi, les traces de lutte…)"
Boris Cyrulnik utilise le terme de résilience ; comment à partir d’une épreuve le vilain petit canard apprend à vivre et se transforme en cygne.
L’épreuve, mythe constitutif de la transformation et du renouveau.
La parade du pervers est terminée dans son effort pour rendre l’autre fou, il ne peut plus retourner la situation pour vous faire plier, et projeter sur vous la cause de tous ses maux.
Vous avez pris la fuite, une fuite sans retour possible à l'instar de Clara ma patiente.
Clara au pays de la perversion narcissique.
Elle ne s’envola pas pour Honolulu, et savoura l’enivrante jouissance de la vengeance !
James l’attendit quatre heures durant à l’aéroport, rempli d’inquiétude !
Patienta-t-il réellement ? Il ne se manifesta pas. Seul, un SMS, le lendemain, insultant, la sortit de sa rêverie matinale.
Clara avait longuement hésité avant d’acheter son billet. Deux ans après leur séparation tumultueuse, pourquoi soudainement réapparaissait-il et lui demandait-il de l’épouser ? Très intuitive, cette femme aux antennes déployées sentit s’infiltrer en elle l’ombre familière du doute. Elle appela James qui sut, comme à son habitude, trouver les mots pour la pacifier. Il vivait seul depuis plusieurs mois. Sa parole légère, volubile, se voulait exagérément rassurante. Il avait réalisé combien son inconduite amoureuse avait ruiné leur vie commune, et avec le temps, s’était reconstruit. Clara était "son destin, sa muse, son ancrage ". Il ne pouvait trouver la sérénité auprès d’une autre.
Clara cédant au chant des sirènes, " accepta " de partir, mais ne souhaita pas résider chez James par crainte d’y ressentir les soupçons se réveiller. Elle connaissait cette pulsion instinctive qui lui faisait fouiller là où se terraient les preuves de son inconduite. Il trouva sa décision saugrenue ; aucune femme n’avait été invitée dans sa nouvelle demeure. Il préparait leur nid d’amour, impatient de l’étreindre. Ses paroles lénifiantes achevèrent d’inquiéter Clara, qui, troublée, sentait une sourde appréhension l’enserrer. Une angoisse, ô combien familière, venait la piquer de ses dards ! Et puis... Aimait-elle encore cet homme ?
Clara était nostalgique de leurs moments intenses, créatifs et lumineux, si souvent anéantis par les démons tentaculaires qui le rattrapaient, et la ravageaient. Dévorée par l’incertitude, un mail signé Flore, abruptement intitulé « La vérité », y mit un terme, quatre jours avant son départ. Le contenu justifia ses doutes. À défaut de l’émouvoir et de la déstabiliser, Clara le lut comme une invite à ne pas se déplacer, un avertissement ultime. Une fin de partie.
Le rêve vola en éclats. Le masque tomba. La vérité, brutale, la délivra de l’emprise qu’il avait exercée sur elle durant toutes ces années.
Après avoir pleuré, attendu, renoncé, puis à nouveau espéré l’insensé, Clara était enfin libérée. Cette femme, dont elle connaissait le nom, lui révélait que James n’avait jamais rompu avec elle. Flore était rentrée d’Hawaï quinze jours auparavant, et s’apprêtait à y retourner pour l’épouser, lorsque, coup de théâtre, elle reçut une notification de rupture la veille, qu’elle lui transféra. James lui avouait que l’unique femme jamais aimée avait toujours été Clara. Sa carrière américaine, mise à mal par ses nombreuses forfaitures, s’effondrait. Son associé exigeait qu’il s’inscrive dans une ligne droite au risque de se séparer de lui. Or, Clara était le seul être qui pouvait lui donner cette verticalité dont il avait besoin. « Nous avons passé du bon temps ensemble, restons amis, nous avons encore tant à partager » lui proposait-il avec son outrecuidance habituelle. Flore énumérait les aides multiples prodiguées à James après que Clara l’eut quitté. Aveuglée par son amour, elle le nourrit, le servit, l’entretint ! Et ce qui aurait dû être temporaire se poursuivit jusqu’au départ de celui-ci pour Hawaï. Totalement dévouée aux besoins de ce prince presque charmant, hypnotisée par ses mots d’amour, Flore, à l’instar de Clara, occulta les coups de téléphone anonyme reçus la nuit par des rivales en pleurs, au bord du suicide et les copies de courriers explicites qui dénonçaient l’infamie de cet homme amène, aux yeux si doux. Flore voulait en finir avec cette vie de tromperies et de leurres :
— " Je n’en peux plus. Si vous aimez encore James, et désirez lui redonner une chance, je vous souhaite d’être heureuse. Je vous devais la vérité ".
Clara, intuitivement, n’eut pas de doute quant aux intentions de Flore. Cette femme trahie ne mentait pas. Elle lui répondit aussitôt :
— " Pouvez-vous me communiquer votre portable ? "
Tous les stratagèmes dont il avait usé s’effondraient, dévoilés. Les pièces du puzzle se mettaient peu à peu en place. Après un échange téléphonique courtois, les deux ex-rivales se rencontrèrent. Très vite, la solidarité féminine chassa le désespoir, et en termina avec le tragique. Un lien immédiat se tissa, réparateur. Clara et Flore se découvrirent, et découvrirent comment cet homme tant aimé les avait trahies et bafouées jusqu’à leur adresser des mails dont la prose et les promesses étaient identiques ! Expert en copier-coller, les courriers comme les femmes étaient interchangeables !
Clara fut, durant un temps, saisie d’épouvante, déracinée d’elle-même, atomisée. L’objet de mort était la duperie, révélée à la lecture de ces envois. Trahie et occise dans les tréfonds de son être, elle sut en son âme qu’elle était libérée de lui et de sa boue. La vérité avait surgi, crue, sans fard. James n’avait eu de cesse de la travestir, mentant constamment sans vergogne à ces femmes. Clara était consciente qu’elles avaient été plus que deux à avoir été leurrées. Elle accepta enfin d’avoir échoué, et lâcha prise.
Le voile des illusions se déchira. Clara put alors accoucher du poison qui l’habita ces années durant. Sa rivale en fut l’instigatrice, mais également la sage-femme, précipitant avec brutalité un processus qui la délivra. Elle révéla à Flore qu’après leur rupture, James n’avait eu de cesse de la rappeler. Ils se voyaient le week-end et certains soirs.
Flore comprit alors le sens de ses absences mensongères réitérées !
James affirmait à Clara que cette dernière l’hébergeait de temps à autre quand il ne pouvait plus courir après le dernier métro pour se rendre à son studio de Pigalle où il résidait depuis leur séparation. En retour, Flore n’exigeait rien, heureuse d’avoir un homme à ses côtés ! Il mentait avec une telle conviction que Clara s’était parfois surprise à le croire… Tout en sachant intimement qu’il y avait certainement méprise, et qu’il ne changerait pas ! Pourquoi s’escrimait-il à noyer la vérité ? Il lui mentait pour mieux l’enchâsser dans ses serres, pour mieux la maîtriser et la posséder. Il la voulait à lui, prophétisant constamment que cette séparation était une mise à l’épreuve pour tester leur amour.
— " Je ne peux être entier sans toi ", lui répétait-il quand il la sentait s’éloigner. Elle accueillait ses paroles comme une déclaration. Mais elles n’étaient cependant qu’appât pour la dominer et la circonvenir davantage. James savait emprunter au vocabulaire de l’autre, mimer sa façon d’être. Son instinct animal et délétère décelait avec une aisance surprenante les ouvertures nécessaires à ses tendances prédatrices. Il avait, toutes ces années durant, réussi avec maestria à endormir Clara, possédant à merveille les techniques du saupoudrage pour la divertir de ses doutes. Il avait su l’envelopper, entonner les mots qu’elle souhaitait entendre, lui sourire de toutes ses dents bien alignées et carnassières :
— « Tu crées tes propres croyances limitantes, réveille-toi ma chérie, le danger n’est pas omniprésent! »
Machiavélique, redoutable caméléon, James maîtrisait, de façon consommée, l’art du camouflage et de la manipulation. De son doux regard candide et velouté, il excellait à retourner les situations, pauvre victime d’une société cruelle, abandonné, disait-il, à trois ans, par une mère encore adolescente quand elle le mit au monde. Son histoire, sordide, digne de " Sans famille " était-elle réelle, remaniée ou alors affabulée. Le saura-t-on jamais ?
Une phrase hanta Clara, obsédante. Un soir de grande intimité, après avoir partagé un joint, ils prirent un bain ensemble. Ils aimaient cette simplicité fusionnelle apaisante ! C’est alors que James prononça cette affirmation fatale, mais sincère, la seule, peut-être, pendant les six années que dura leur relation :
— " The only truth is that I never tell the truth " " La seule vérité est que je ne dis jamais la vérité ".
Martine Gercault
Janvier 2019
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